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En Ukraine, l’utilisation des armes explosives a coupé du monde certaines parties du territoire

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Prévention | Réduction de la violence armée | Urgence | Ukraine | PUBLIÉ LE 23 février 2024
Zone désertée en Ukraine

© M. Monier / HI

Deux ans après l’escalade du conflit en Ukraine, on estime que 25 % du territoire a été exposé à d’intenses combats. En détruisant les infrastructures essentielles, les routes, les hôpitaux ou encore les écoles, l’utilisation massive des armes explosives a coupé du monde certaines localités et leurs communautés.

Les impacts directs (réduction d’accès aux services essentiels, tels que la santé, les moyens de subsistance, etc.) et indirects (éducation, santé mentale, lien social etc.) de l’utilisation d’armes explosives sur les populations civiles sont particulièrement importants chez les personnes les plus à risques, comme les personnes âgées, les enfants et les personnes handicapées.

Des menaces invisibles, un territoire morcelé et des communautés désormais isolées

Dans certains territoires, notamment dans les régions de Kharkiv et Dnipro, à l’Est, ou encore Mykolaiv et Kherson, plus au Sud, la fréquence accrue des bombardements et l’étendue de la contamination par les restes explosifs de guerre a coupé du monde certaines localités.

Dans les zones constamment bombardées, les habitants n’ont ni électricité, ni gaz, ni eau, et elles dépendent de générateurs pour les données mobiles et l'internet, qui restent limités. La nourriture et les produits non alimentaires disponibles dans ces zones sont également limités. Lorsque les communautés sont accessibles, les principaux besoins concernent le carburant et les générateurs, afin d'alimenter les pompes à eau, qui continuent d'être affectées par les bombardements et les surtensions.

Les besoins sont particulièrement aigus au sein de petites villes ou villages ruraux, éloignées des installations médicales, dépendantes des systèmes de transports et où les ressources sont souvent centralisées dans un seul magasin, une seule épicerie ou un seul bureau de poste.

« Le seul café que nous avions est en ruines. Nous n’avons pas de magasin ici, nous n’avons plus rien. Pour les soins médicaux, il nous faut prendre la voiture et faire au moins 25 kilomètres. Sinon, un médecin se rend dans le village une fois par semaine. Qui se soucie de nous ? »

Inna est une ancienne agricultrice et habitante de Velyka Komyshuvakha, un village agricole situé dans la région de Kharkiv. D'avril à septembre 2022, le village a été occupé par les forces russes et est aujourd'hui détruit à 90 %, selon les autorités locales.

La contamination à grande échelle des terres par les restes explosifs de guerre a également créé une « menace invisible » dans l’esprit des personnes les conduisant à restreindre leurs déplacements, à cesser de cultiver leurs terres ou à cesser leurs activités sociales, économiques ou professionnelles.

Des conséquences disproportionnées sur les communautés vulnérables

Avant l’escalade du conflit, l’Ukraine comptait près de 3 millions de personnes en situation de handicap. En outre, un quart de la population a plus de 60 ans et plus de 80 % des retraités célibataires, dont une majorité de femmes, vivent sous le seuil de pauvreté.

Dans les zones peuplées proches de la ligne de front, la plupart des habitants ont été évacués ou ont fui les combats. Mais tous, n’ont pas pu quitter leur terre et se mettre à l’abri. En effet, d’après les témoignages recueillis par HI, une grande majorité de personnes âgées, avec une forte proportion de personnes handicapées, sont restées dans ces zones, malgré les bombardements constants soit parce qu'elles étaient réticentes à partir, soit parce qu'elles étaient incapables de le faire.

« Les personnes les plus à risque sont particulièrement nombreuses dans ces zones inaccessibles, soit parce qu’elles étaient réticentes à partir, soit parce qu’elles n’en ont pas eu les moyens. L'isolement, les bombardements constants et le manque de soins essentiels ont des répercussions sur la santé mentale et psychosociale et affecteront ces communautés et leurs aidants pendant des années », explique Anna-Marie Robertson, responsable du plaidoyer pour HI Ukraine.

Après deux ans d’hostilités, les difficultés d’accès aux soins de santé font partie des besoins humanitaires les plus importants que constatent les équipes de HI en Ukraine

« La réduction de l'accès à des besoins aussi fondamentaux que les soins médicaux a de graves conséquences : une détérioration générale de la santé des personnes et l'aggravation des maladies chroniques ou l'apparition de nouvelles maladies chez certains bénéficiaires. L'exposition à un stress chronique dans le contexte d'une guerre en cours peut également affecter la santé des personnes, les affaiblissant à la fois psychologiquement et physiquement », indique Irina Yashchuk, responsable du projet santé de HI dans l’Est de l’Ukraine.

Une aide humanitaire inclusive pour répondre à des besoins encore plus importants dans les zones peu accessibles

À ce jour, 14,6 millions de personnes ont besoin d’aide humanitaire, dont près de 4 millions de personnes déplacées à l'intérieur du pays, 4,4 millions de rapatriés et 6,9 millions de personnes qui sont restées chez elles tout au long de la guerre.

Depuis deux ans, HI est présente en Ukraine pour porter assistance à toutes les victimes de la guerre. L’organisation a mis en place une réponse multisectorielle allant de la réadaptation et du soutien psychosocial à la sensibilisation aux risques liés aux engins explosifs, à la livraison de biens humanitaires aux populations touchées par les conflits, à la fourniture d'articles d'hygiène essentiels et d'argent liquide pour répondre aux besoins les plus urgents des personnes déplacées, tout en plaidant en faveur d'une réponse humanitaire inclusive.

Certaines missions telles que l’accès aux soins de santé, l’acheminement de l’aide humanitaire et l’éducation aux risques liés aux engins explosifs de guerre sont particulièrement essentielles dans les zones plus difficiles d’accès et les missions de HI s’adaptent à ces contextes.

HI soutient en réadaptation et en soutien psychosocial, neuf hôpitaux ukrainiens, notamment dans les régions proches de la ligne de front, dans les régions de Kharkiv et Dnipro qui accueillent de nombreux blessés de guerre. Des équipes mobiles sont également déployées dans divers lieux d’accueil et à domicile pour fournir des services de réadaptation aux groupes plus vulnérables, isolés des structures de santé.

L’aide humanitaire doit être acheminée jusque dans les territoires les plus isolés. Pour cela, HI, via sa division logistique, Atlas Logistique, permet le stockage et le transport de biens humanitaires pour le compte d’autres ONG et couvre actuellement 23 oblasts, dans l’Est et dans le Sud de l’Ukraine.

Enfin, la sensibilisation des communautés aux dangers liés aux restes explosifs de guerre est essentielle et d’autant plus importante dans les zones isolées car les comportements « à risques » y sont très fréquents, note HI en Ukraine. L’organisation propose des sessions de préparation et de protection contre les conflits (CPP) et de sensibilisation aux risques liés aux munitions explosives (EORE) afin de permettre aux enfants, adultes, travailleurs humanitaires, d'identifier les signes de danger dans les zones contaminées par des munitions explosives et de mieux se protéger en adoptant des comportements sûrs face aux menaces. Certaines sessions sont également faites via internet quand l’accès aux communautés est rendu impossible pour des raisons de sécurité.

« J'ai été démineuse et je peux vous dire qu'il faudra des décennies pour tout décontaminer. Avec le temps, les habitants des grandes villes sont de plus en plus conscients des risques. Mais je pense qu'il est important de continuer à aller dans ces villages isolés pour informer les gens des dangers. Ce sont des zones où personne ne veut aller parce qu'elles sont trop difficiles d'accès. Les gens sont moins conscients des risques. Je veux sauver le plus de vies possible », raconte Victoria Vdovichuk, chef d’équipe éducation aux risques (EORE) de HI.


La présence de HI en Ukraine

  • Personnel HI : 306 employés (270 nationaux + 36 internationaux).
  • Bureaux HI dans le pays : Lviv, Kyiv, Poltava, Dnipro, Kharkiv et Mykolaiv.

Nos activités en chiffres (depuis le début de l'intervention d'urgence de HI en 2022 – actualisation janvier 2024)

  • Près de 16 000 séances de réadaptation (environ 2 400 bénéficiaires) ont été organisées en Ukraine. 689 personnes ont bénéficié de services de réadaptation spécialisés (brûlures).
  • 540 membres du personnel de santé formés à la réadaptation physique et en soutien psychosocial.
  • 1 300 points focaux communautaires en première ligne ont été formés à la réadaptation physique et en soutien psychosocial.
  • 3 700 séances de soutien psychosocial en groupe et individuelles ont été dispensées à 6 700 bénéficiaires.
  • Environ 12 000 kits d'hygiène distribués à 15 000 bénéficiaires et soutien à 54 centres d’accueil de personnes déplacées.
  • 3 700 personnes identifiées, évaluées et orientées vers les services appropriés et 120 personnes (travailleurs de première ligne, représentants des communautés) formées aux principes de protection et d'inclusion.
  • 3 200 sessions communautaires EORE (sur site et en ligne) ont été organisées, touchant plus de 89 000 bénéficiaires. 2 800 travailleurs humanitaires et 337 points focaux communautaires ont été formés.

Handicap International - Humanity & Inclusion

HI a été l'une des principales organisations de la société civile dans le processus qui a conduit à la récente signature de la Déclaration politique sur les armes explosives dans les zones peuplées (EWIPA), adoptée en novembre 2022. Dans le cadre du Réseau international sur les armes explosives (INEW), HI a pour objectif de continuer à surveiller l'impact humanitaire de l'utilisation des armes explosives, la mise en œuvre de la Déclaration politique et de demander aux États de rendre compte de leurs engagements.

 
Couverture d'un rapport HI Couverture d'un rapport HI Couverture d'un rapport HI Couverture d'un rapport HI

Hors d’atteinte

Rapport de Handicap International

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