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Mehari, un modèle de résilience pour les victimes d’armes explosives

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Réadaptation | Réduction de la violence armée | Ethiopie | PUBLIÉ LE 5 septembre 2025
Un jeune homme se tient devant l'entrée de son atelier.

Ethiopie, 2025. Blessé par une fusée de mortier utilisé pendant le conflit au Tigré, Mehari est aujourd'hui en voie de reconstruction et développe son entreprise. | © Halefom Bale / HI

Blessé par une fusée de mortier, héritée du conflit au Tigré, Mehari est aujourd’hui engagé sur la voie de la reconstruction et développe son activité.

Entre 2022 et 2022 la région du Tigré, au nord de l’Éthiopie, a été le théâtre de l’un des conflits armés les plus violents ces dernières décennies. Comme toujours, les civils sont les premières victimes : en seulement deux ans, ce sont plusieurs centaines de milliers de personnes qui ont perdu la vie, ont été blessées ou déplacées pour fuir les affrontements. À la violence et aux souvenirs du conflit passé, s’ajoute aujourd’hui le danger des engins explosifs, menaçant la vie de la population et entravant tout espoir de retour « à la normale ». Mehari Amara Tadele, victime de l’un de ces engins, raconte comment sa vie a basculé. 

L’héritage explosif des conflits : quand le quotidien devient un danger

Mehari Amare Tadele est un jeune homme de 36 ans, il habite dans le village d'Adikeala Kebele dans le woreda  de Seharti au sud du Tigré. Avant le conflit Mehari avait une activité de métallurgie, cette petite entreprise lui permettait de subvenir aux besoins de sa femme et de ses quatre enfants.

Comme celle de tant d’autres personnes, la vie de Mehari a basculé à cause du conflit au Tigré : les armes explosives contaminent durablement les territoires, souvent encore des décennies après que les affrontements ont eu cessés. L’accident de Mehari a eu lieu en 2024, lorsqu’il travaillait. L’explosion lui a coûté son œil et sa main gauches, ainsi que d’autres blessures grave. Il se souvient :

« Je me rappelle très précisément la date, c’était le 16 avril. J’étais en train de broyer de la ferraille, je l’avais récupéré dans des restes de guerre abandonnés. Je n’ai pas vu qu’il y avait une fusée de mortier parmi les morceaux de métal » se souvient le jeune homme.

En plus des blessures physiques, les survivants d'engins explosifs font face à un véritable traumatisme psychologique. Le choc est immense, surtout lorsque la blessure conduit à un handicap permanent, comme ce fût le cas de Mehari. L’acceptation peut être difficile, il faut assimiler une nouvelle réalité, appréhender le quotidien différemment… Le chemin de la reconstruction est parfois long. 

Dans le cas du jeune homme, cet accident a également été synonyme de grandes difficultés financières : incapable de travailler, il a été contraint de vendre son équipement indispensable, notamment son compresseur, pour survivre. Une pression et un stress supplémentaire qui a plongé la famille dans une grande incertitude.

« Cette période a été très éprouvante pour nous, il fallait accepter que notre quotidien change, que les difficultés seraient nombreuses… L’entreprise de Mehari était notre seule source de revenus, pendant des mois l'avenir de notre famille était incertain », explique sa femme, Trhas Adane.

Une reconstruction admirable, de survivant à chef d’entreprise

Après plusieurs mois à prendre le temps de la reconstruction, la voie de la guérison s’est accélérée pour Mehari. Le jeune métallurgiste a fait la rencontre de HI et a été pris en charge par le Centre d’orthopédie et de kinésithérapie de Mekelle, la capitale de la région du Tigré, pour y recevoir des soins et une prothèse de main. Ce tournant n’était qu’un début.

En février 2025, via un projet mené par HI dans la région, Mehari a bénéficié d'un soutien pour développer une activité lui permettant d’avoir des revenus. Il a ainsi reçu une aide financière ainsi qu’une formation pour le développement de petites entreprises. En parallèle, Mehari était toujours suivi par HI dans le cadre d’un accompagnement en santé mentale et soutien psychosocial ; une prise en charge essentielle pour permettre aux personnes victimes d’armes explosives d’aller de l’avant et repartir sur de bonnes bases. Lorsqu’il a tenté de reprendre son ancienne activité de métallurgie, Mehari a rencontré quelques difficultés :

« Au départ c’était difficile, mais son expérience et la formation lui ont permis de rebondir ! Mehari s’est rapidement adapté et a relancé son entreprise avec une nouvelle énergie. Il a racheté les outils qui lui étaient essentiels et a commencé à développer son activité », souligne Mebrahtom, Directeur de la création d’emplois dans le woreda.

Aujourd'hui, la transformation de Mehari est remarquable. Sa situation est stable, ses revenus lui permettent à lui et sa famille d’être totalement autonomes, il a même réussi à employer deux ouvriers qualifiés et un agent de sécurité. 

« Du statut de survivant, j’ai retrouvé d’entrepreneur et aujourd’hui, celui d’employeur ! J’espère que mon histoire aidera d’autres victimes de ces armes, le rétablissement est possible avec un soutien adapté, c’est ce qu’il faut retenir. » ajoute le jeune homme.

Cette énergie, il la met également à profit pour aider sa communauté : Mehari est toujours en contact avec HI et a alerté ses équipes de la présence d’armes explosives près de son atelier. L’équipe de HI a ainsi pu intervenir et retirer 19 engins explosifs.

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