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« J’ai l’impression que cette explosion, c’était hier »

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Urgence | Liban | PUBLIÉ LE 30 juillet 2021
Scènes de destruction dans la zone de Karantina /Quarantaine à Beyrouth prises près de 2 semaines après l'explosion, 2020

Scènes de destruction dans la zone de Karantina /Quarantaine à Beyrouth prises près de 2 semaines après l'explosion, 2020 | © Tom Nicholson / HI

Un an après l’explosion du 4 août à Beyrouth, HI staff Nahed Mansour revient sur les événements de ce jour tragique et leurs conséquences toujours palpables sur la ville.

Lorsque vous repensez à cette journée du 4 août 2020, de quoi vous souvenez-vous ?

Je me souviens de la rivière de sang qui ruisselait dans les rues, des cris de la population, des fenêtres soufflées par l’onde de choc et de l’immeuble qui s’est effondré. Je me souviens de la façon dont les gens ont pris soin les uns des autres. Après l’explosion, des personnes venues de tout le Liban sont arrivées à Beyrouth pour soutenir les familles touchées, malgré la quarantaine imposée. L’un des bénévoles a secouru une femme gravement blessée sous mes yeux. Elle lui a dit qu’elle avait la COVID-19, et qu’il devait rester loin d’elle. Mais il a répondu « peu importe, je ne vous laisserai pas mourir ». Et il l’a portée dans ses bras jusqu’à l’hôpital. Je n’oublierai jamais cette scène.

 

Comment qualifierez-vous la période qui a suivi l’explosion ?

J’ai l’impression que cette explosion, c’était hier. Pour ceux qui ont perdu un proche ou leur maison, ou qui se retrouvent handicapés à vie, ou encore marqués dans leur chair, rien n’a changé, en fait. De telles conséquences ne sont pas faciles à oublier, tout particulièrement si justice n’est pas faite. La population est frustrée par le manque de moyens déployés pour soulager la crise actuelle.

 

Selon vous, Beyrouth a-t-elle changé au cours de ces douze derniers mois ?

Avant l’explosion, le pays était déjà en crise, une crise socio-économique et sanitaire aux multiples facettes. Les Libanais se sont montrés résilients, et se sont accrochés à l’espoir que la situation allait s’arranger et que le pays allait changer.

Cependant, les dégâts causés par l’explosion ont suffi à balayer cet espoir et à anéantir ce rêve. Les cicatrices visibles et le traumatisme ineffaçable de cet événement ont conduit les gens à abandonner. Nombreux sont ceux qui ont fermé leur entreprise pour partir essayer de se construire ailleurs un avenir plus radieux. Cette ville dynamique n’est plus que l’ombre d’elle-même. Les Libanais sont connus pour leur amour de la vie et leur capacité à faire face. Mais je crains que l’explosion n’ait contribué au déclin de la vie nocturne, des festivals, de la joie de vivre et de la sécurité à Beyrouth.

 

Pour vous, quel est le besoin le plus urgent aujourd’hui, un an après l’explosion ?

En ma qualité de responsable du projet Livelihood chez HI, je pense que le besoin le plus criant aujourd’hui est de mettre en place des projets similaires qui soutiennent les citoyens dans leur guérison et le rétablissement des entreprises, pour renforcer la résilience économique. Ce projet va aider la ville et les marchés à se remettre, et relancer l’espoir de pouvoir vivre et investir au Liban.

 

Je ne vais pas bien. Mais je veux que la vie reprenne ses droits. Je veux revoir Beyrouth la dynamique. Je veux revoir un sourire sur le visage des gens. Alors non, je ne vais pas bien. Mais je crois que je dois prendre part au changement, et soutenir les autres. Nous devons nous relever ensemble pour reconstruire Beyrouth et tout le Liban. Pour sauver le Liban, nous avons besoin d’espoir et de force.

 

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