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La mise en oeuvre de la CDPH et les mécanismes de suivi

 
 

Il me semble important d'apporter certaines clarifications concernant le protocole facultatif. La Convention pour le droit des personnes handicapées définit dans les articles 34 à 40 les mécanismes de contrôle et de suivi international, comme c’est le cas pour tous les autres traités des Nations unies. Une série de fonctions et d’attributions du Comité sont fixées, chaque État partie par exemple doit présenter au Comité un rapport sur la mise en place de la Convention. Cela exclut toutefois la réception de demandes ou de plaintes. Cette question est en fait réglée par un texte séparé appelé Protocole Facultatif qui porte sur la compétence du Comité à examiner les recours, autorisant les visites de sites pour enquêter sur des violations présumées des droits humains. Certains États parties n'étaient pas à l'aise avec l'idée de se soumettre à de telles obligations. D’où l'idée d’un protocole facultatif qui prend des mesures que les Etats parties peuvent ratifier ou ne pas ratifier, indépendamment de leur adhésion à la Convention. Par conséquent, les Etats peuvent ratifier la Convention sans avoir à respecter les mesures prises par le protocole facultatif. Certains comme le Honduras, le Nicaragua et l’Uruguay ont dans un premier temps signé la Convention et ultérieurement ratifié le protocole facultatif.

Luis Fernando Astorga

Une fois que la convention est ratifiée dans votre pays ; chaque Etat fait un rapport et la société civile soutient la constitution d’un rapport alternatif. La constitution de ce rapport alternatif est soutenue par le bureau d’IDA à Genève, pour qu’il soit présenté dans les meilleures conditions, quand le pays doit faire sa présentation à Genève. Il y a également tout un travail à faire pour la conférence des Etats-parties à New York, pendant laquelle les Etats et la société civile échangent sur les bonnes pratiques et les processus de mise en œuvre de la Convention. Mettre en œuvre la Convention, ce n’est donc pas regarder le ciel et faire des prières, se dire que ce texte est tout à fait innovant mais impossible à mettre en œuvre. Il y a tout un travail à faire au quotidien, sur des points extrêmement concrets et extrêmement pratiques pour faire avancer les choses. Il faut l’utiliser dans un premier temps dans la machine « droits de l’homme », à travers les rapports des Etats et ceux alternatifs de la société civile qui sont présentés devant le Comité. Il y a un travail aux niveaux national et international, il faut vraiment utiliser ces outils et les faire fonctionner le mieux possible.

Philippe Chervin

Le Comité fait le point sur les progrès réalisés par les pays dans la mise en oeuvre de la Convention. Après le passage en revue, il produit un rapport adressé aux Etats membres avec ses observations finales qui constituent en principe des recommandations faites aux Etats pour améliorer les conditions de la mise en oeuvre de la Convention. Très souvent, les Etats restent sourds aux observations finales; c’est variable. Certains sont hypersensibles aux déclarations faites aux Nations unies, et lorsqu'une déclaration est faite sur une thématique particulière, ils ont l’impression que cela interfère avec leur souveraineté. D'autres pays ne respectent pas grand chose de ce qu'ils ratifient. Ils reçoivent les observations finales et puis rien ne se passe. C'est un vrai risque et c'est là que la société civile a un rôle important à jouer, celui de contraindre les gouvernements à appliquer les mesures.

Silvia Quan

La ratification de la Convention par un pays, c’est un moyen par lequel il est possible d’attirer l’attention des gouvernants. En effet, la signature d’une Convention est un acte par lequel les Etats s’engagent en connaissance de cause. Il est donc nécessaire qu’ils aient les moyens de la mettre en œuvre. Concernant cette Convention portant sur les droits reconnus aux personnes handicapées, il est nécessaire que les pays qui l’ont ratifiée fassent preuve de respect pour leur engagement. Du point de vue de la société civile, il y a sans doute encore un gros travail à fournir, car les Nations Unies ne peuvent pas se doter d’une convention et s’arrêter là. Il est nécessaire d’aller voir les pays ce qu’il s’y passe réellement et ne pas se contenter de ce que les pays viennent raconter à la tribune, face aux autres Etats-membres. C’est presque toujours la même histoire, à écouter les discours tenus par chacun des pays, on a l’impression qu’ils sont plutôt dans le modèle social/caritatif. Ces principes ne sont pas ceux prônés par la Convention, qui est basée sur la garantie des droits.

Idrissa Maiga

Quels sont les facteurs de changement pour une mise en œuvre de la Convention ? Il faut la collaboration de l’Etat, de la société civile, mais également la participation des PH. Il faut inclure les PH dans les comités de suivi de la Convention, pour voir si les textes de loi qu’on a établis sont bien conformes avec la Convention pour que ça ne soit pas des belles paroles, mais que ce soit vraiment réalisé.

Bodo Razafinimana

Je pense que la mise en œuvre de la Convention, c’est quelque chose qui est vraiment très lent dans nos pays ; mais des efforts se font. Cette mise en œuvre passe pour nous par une étape très importante, c’est l’élaboration du rapport initial. Parce que si vous voulez aller de l’avant, il faut savoir où vous en êtes actuellement. Et, à travers les recommandations, les observations, ce que vous pouvez améliorer et faire évoluer. Mais aujourd’hui, c’est difficile d’avoir des données, de connaître la situation actuelle s’il n’y a pas de véritable étude, à travers l’élaboration de ce rapport initial. Malheureusement depuis la ratification de la Convention en 2011 par le Togo, nous avons présenté en 2013 un rapport alternatif, mais l’Etat n’a rien fait. Personnellement je me suis donc investi, en essayant de convaincre les partenaires que si l’Etat ne fait rien, nous avions l’obligation de pousser l’Etat à faire. Et j’ai été entendu par les partenaires qui nous ont accordé un financement, afin de former les points focaux de ministères à la collecte d’informations pour l’élaboration du rapport initial. Ça a été une chose très appréciable et ça a permis un déclic au niveau de l’Etat qui a pris la relève pour mobiliser les ressources et aujourd’hui le rapport initial est disponible. Il s’agit là vraiment d’une prouesse dont je me félicite car nous avons osé, et ça a donné ce résultat.

Ayassou Komivi

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